

Plastic Odyssey, un bateau contre les plastiques
Pour le jeune marin français Simon Bernard, la guerre aux déchets plastiques a démarré en 2016. Depuis le ponton de son navire, il a découvert, sidéré, les montagnes de déchets accumulés dans la baie de Hann, plage de sable blanc devenue égout à ciel ouvert de la capitale sénégalaise, Dakar.
Des déchets "à peu près partout" sur la côte "se déversaient dans la mer au gré des marées, des vagues", se souvient M. Bernard, 34 ans, au cours d'une rencontre avec l'AFP lors d'un bref passage à Paris.
Pour le jeune matelot de l'époque, le choc est rude. "En mer, le plastique, on ne le voit pas" dit-il.
Bouleversé de voir les pêcheurs remonter "énormément de plastique dans leurs filets", l'aspirant marin, tout juste diplômé de la Marine marchande, fonde "Plastic Odyssey" avec un autre ingénieur, Alexandre Déchelotte: une expédition maritime autour du globe à bord d'un navire laboratoire de 40 mètres, avec de multiples escales en partenariat avec des associations locales pour sensibiliser les populations, et notamment les enfants, aux 20 tonnes de déchets plastiques qui se déversent dans les océans chaque minute.
- Trente escales de trois semaines -
Il est allé chercher des sponsors pour financer l'expédition, à commencer par une grande marque française de cosmétiques qui utilise du plastique dans ses emballages et communique sur cette association dans le cadre de son engagement à augmenter la part du plastique recyclé.
Son initiative n'a qu'un impact infime dans la lutte mondiale contre la pollution plastique, mais comme d'innombrables autres, elle vise à montrer à son échelle qu'un avenir avec moins de plastique est impératif.
Simon Bernard n'est pas dupe: "La vraie solution pour lutter contre la pollution plastique, c'est d'éviter d'en utiliser". Voire de réduire la production à la source, comme le plaident les ONG et plusieurs gouvernements durant les négociations internationales de l'ONU sur la réduction des pollutions plastiques, qui se sont ouvertes à Genève mardi.
L'opération comprend aujourd'hui 35 salariés.
Renonçant à piloter les ferries de la côte normande auxquels il était promis, le jeune marin est parti de France le 1er octobre 2022. Il est aujourd'hui à Mayotte, presque au bout de ses 30 escales de trois semaines sur trois continents, dans des régions côtières polluées par le plastique.
- "Transformer les poubelles en nourriture" -
Mer Méditerranée, océan Atlantique, Indien, ou Pacifique: de Marseille à Marseille en passant par Beyrouth au Liban, Dakar au Sénégal, Recife au Brésil en 2023, Madras (Chennai) en Inde en mars dernier, avec à chaque fois des rencontres avec des associations locales, des start-up ou entreprises travaillant pour collecter, trier ou recycler le plastique. Au bout de deux ans et demi de rencontres, Simon Bernard, qui a largué son appartement à terre et vit sur le bateau, dit avoir été surtout frappé par "l'inventivité" des gens qu'ils rencontre, notamment ceux qui ont tout perdu "dans un contexte dévasté, dans une crise extrême".
Comme "cet entrepreneur au Liban qui a réussi à transformer les poubelles en nourriture", Georges Bitar, qui collecte en porte-à-porte des déchets ménagers recyclables auprès de 60.000 personnes dans un pays qui n'a plus de système de ramassage public.
Le Plastic Odyssey a collecté "une bonne centaine" de solutions locales pour se passer de plastique, issu du pétrole.
A commencer par un système "qui fonctionne très bien à bord du bateau" permettant de potabiliser l'eau et donc de faire sans bouteilles en plastique. "Cela nous a évité 25.000 bouteilles d'eau en deux ans, quasiment une tonne de plastique évité", calcule le marin.
F.Braun--VZ